La liberté de la presse dans le monde : le rapport 2025 de Reporters sans Frontières

15 mai 2025

Le 2 mai, l’ONG Reporters sans frontières a publié son 23ème rapport sur l’état de la liberté de la presse dans le monde. De quoi s’agit-il exactement ? Décryptage dans cet article. 

Qu’est-ce que Reporter sans frontières ? 

Reporter sans frontières (très souvent abrégé en “RSF”) est une organisation non gouvernementale internationale fondée en 1985 par quatre journalistes dans l’objectif de défendre la liberté de la presse dans le monde. 

RSF définit ainsi sa mission : “Reporters sans frontières (RSF) défend le droit, pour chaque être humain, d’avoir accès à une information libre et fiable. Ce droit est essentiel pour connaître, comprendre, se forger une opinion et agir en pleine conscience, individuellement et collectivement.” 

RSF agit notamment : 

  • en faisant connaître et en dénonçant les atteintes à la liberté de la presse ; 
  • en apportant un soutien financier à des journalistes persécutés en raison de leur activité ; 
  • en apportant son soutien aux journalistes réfugiés ; 
  • en publiant chaque année un rapport sur la liberté de la presse dans le monde.  

Qu’est-ce que le rapport sur la liberté de la presse dans le monde ? 

Dans le rapport, 180 États sont passés au crible : RSF évalue les conditions dans lesquelles les journalistes peuvent effectuer – ou non – leur travail, s’ils risquent la censure ou s’autocensurent, s’ils sont victimes de menaces, etc. Un commentaire accompagne l’étude menée dans chaque pays. 

En 2025, c’est la Norvège qui se hisse en tête du classement. RSF précise : “En Norvège, la liberté de la presse bénéficie d’un cadre juridique solide. Le marché des médias est dynamique, fort d’un radiodiffuseur de service public très présent et d’un secteur privé diversifié avec des sociétés d’édition garantes d’une grande indépendance éditoriale.” 

Le dernier pays du classement est l’Érythrée, avec ce commentaire de RSF : “La presse, comme toute la société érythréenne, est soumise à l’arbitraire absolu du président Issaias Afeworki, responsable de crimes contre l’humanité selon un rapport de l’ONU de juin 2016. Il n’existe aucun média indépendant dans ce pays tristement réputé pour les plus longues détentions de journalistes dans le monde.” 

La France arrive en 25ème position, avec cet avertissement : “Si le cadre légal et réglementaire est favorable à la liberté de la presse, les outils visant à lutter contre les conflits d’intérêts et à protéger la confidentialité des sources sont insuffisants, inadaptés et dépassés. L’absence de financement pérenne après la suppression de la redevance fragilise l’audiovisuel public. En dépit de l’adoption d’un nouveau schéma du maintien de l’ordre, plus respectueux des droits des journalistes lors des manifestations, les reporters continuent de faire l’objet de violences policières en plus des agressions de la part de manifestants.” 

Sur quels critères repose ce rapport ? 

RSF attribue à chaque pays un score de 0 à 100. Il est précisé : “Un haut degré de liberté de la presse est associé à un score élevé, et inversement.” Par exemple, la France est notée 76,62 / 100. Pour les “extrêmes”, la Norvège obtient la note 92,31 / 100 et l’Érythrée 11,32 / 100. 

Le score est décliné ainsi : 

  • Entre 85 et 100 : bonne situation. 
  • Entre 70 et 85 : situation plutôt bonne. 
  • Entre 55 et 70 points : situation problématique. 
  • Entre 40 et 55 points : situation difficile. 
  • Entre 0 et 40 points : situation très grave. 

Notons qu’il ne suffit pas d’être un pays démocratique pour s’assurer un classement honorable. Par exemple, avec un score de 65,49, les États-Unis sont considérés comme un État où la situation de la presse est considérée comme problématique. RSF ajoute ce commentaire : “Après un siècle d’expansion progressive des droits de la presse aux États-Unis, le pays connaît un recul significatif de la liberté de la presse, encore exacerbé avec l’arrivée de Donald Trump au pouvoir pour un second mandat.” 

Pour établir ce score, RSF s’appuie sur un relevé quantitatif des exactions commises envers les médias, ainsi que sur une analyse basée sur cinq indicateurs, qui sont les suivants : 

  • Indicateur politique : il permet d’évaluer l’autonomie dont disposent les médias, ainsi que le pluralisme face aux pressions qui peuvent être exercées par le gouvernement ou d’autres acteurs de la vie politique. 
  • Indicateur économique : il permet d’évaluer les diverses contraintes économiques qui pèsent sur les médias. 
  • Indicateur législatif : il permet d’évaluer le cadre légal dans lequel les médias évoluent et la protection juridique dont ils bénéficient. Il évalue également l’accès à l’information sans discrimination entre les journalistes. 
  • Indicateur social : il permet d’évaluer la pression sociale et les contraintes culturelles qui peuvent peser sur les journalistes. 
  • Indicateur sécurité : il permet de mesurer tout ce qui concerne la sécurité des journalistes (dommages corporels et psychologiques, perte d’emploi, saisie d’équipement…). 

Quelles sont les enseignements du rapport 2025 ? 

Le rapport 2025 fait état d’un recul inquiétant de la liberté de la presse dans plusieurs régions du monde. Cela concerne en premier lieu la Russie, qui a davantage “cadenassé” les médias opérant sur son territoire depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, et la Palestine, dont les médias subissent la situation sanitaire et économique désastreuse et où les journalistes sont tués par l’armée israélienne.  

RSF précise cependant que le facteur majeur pesant sur la liberté de la presse dans le monde est économique : “Concentration de la propriété, pressions des annonceurs ou des financeurs, absence, restriction ou attribution opaque des aides publiques… À l’aune de ces données mesurées par l’indicateur économique du Classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières (RSF), un constat s’impose : les médias sont aujourd’hui pris en étau entre la garantie de leur indépendance et leur survie économique.” 

Aux États-Unis, la situation économique des médias est particulièrement préoccupante : RSF précise que certains territoires menacent de devenir des “déserts informationnels”. L’ONG ajoute que les GAFAM pèse sur l’économie des médias de manière très négative et que cela augmente le risque de désinformation. Notre pays n’est pas épargné : “En France (25e, – 4 places), une part significative de la presse nationale est contrôlée par quelques grandes fortunes. Une concentration croissante qui restreint la diversité éditoriale, accroît les risques d’autocensure et pose de sérieuses questions sur l’indépendance réelle des rédactions vis-à-vis des intérêts économiques ou politiques de leurs actionnaires.” 

L’ONG précise encore qu’en 2025, “les conditions d’exercice du journalisme sont mauvaises dans la moitié des pays du monde”. Il s’agit d’une dégradation conséquente. RSF précise que “le score moyen de l’ensemble des pays évalués passe sous la barre des 55 points (“situation difficile”). Plus de six pays sur dix (112 au total) voient leur score reculer dans le Classement.” 

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